Entre les XVIe et XIXe siècles, des femmes enceintes non mariées allaient déclarer leur grossesse… au juge, au greffier ou au notaire. Pourquoi ? Pour ne pas être accusées d’infanticide si leur bébé mourait sans avoir été baptisé. Et ces déclarations, aussi surprenantes que touchantes, recèlent aujourd’hui des trésors pour les généalogistes. Exploration d’une pratique oubliée qui en dit long sur nos ancêtres… et leurs amours contrariées.
Une obligation légale vieille de plusieurs siècles
La pratique de la déclaration de grossesse prend véritablement son envol avec l’édit royal de février 1556, promulgué par Henri II. Ce texte législatif marque un tournant : il impose aux femmes célibataires ou veuves de signaler leur grossesse aux autorités. Mais attention, cette obligation ne sort pas de nulle part. Des pratiques semblables figuraient déjà dans les coutumes locales, bien avant cet édit royal — preuve que le contrôle des grossesses hors mariage préoccupait les pouvoirs publics de longue date.
L’édit de 1556, enregistré au Parlement début mars de la même année, formalise à l’échelle du royaume une politique de surveillance très spécifique : toutes les grossesses illégitimes doivent être déclarées et consignées par écrit. Le but affiché ? Prévenir les infanticides. Et la présomption d’infanticide est alors automatique, en cas de décès du nouveau-né, avec à la clé : la peine de mort.
Oui, vous avez bien lu. Et cette loi, loin de tomber en désuétude après quelque temps, est rappelée régulièrement par les rois successifs. Henri III le confirme en 1586, puis des rappels sont promulgués en 1695, 1698 et 1708, notamment par Louis XIV. Tous insistent sur la responsabilité des juges et des curés à faire appliquer la loi. Ces textes circulent dans tout le royaume, et on en trouve des copies dans les fonds d’archives des séries A et B, preuve de leur diffusion. Jusqu’au XVIIIe siècle inclus, la législation reste vivace — et appliquée.
Et après la Révolution ?
Le coup de grâce vient du Code civil de 1804. La recherche de paternité est interdite, sauf cas très précis (enlèvement par exemple). Résultat : les déclarations ne servent plus qu’à exprimer un état de fait. On ne nomme plus les pères, et on évite toute narration. J’ai entendu parler d’un juge de paix de Lyon qui donne acte à une femme « pour faire reconnaître la paternité », alors que cette action est interdite depuis quelques années. Oups. On comprend que chaque officier de justice faisait ce qu’il pensait devoir faire.
Au XIXe siècle, elles deviennent rares, courtes, voire… orales.
Et pourtant, dans le Morvan, certaines communes conservent cette tradition jusqu’à la fin du XIXe siècle ! Une vieille coutume, vidée de sa portée légale, mais maintenue par pression sociale.
Entre morale, justice et spiritualité
Derrière cette mesure se cache une logique bien particulière : il ne s’agit pas uniquement de protéger l’enfant ou sa mère, mais surtout de maintenir un ordre moral et spirituel. Le pouvoir royal entend contrôler les naissances hors mariage, mais également moraliser la sexualité féminine. Les femmes soupçonnées d’avoir des rapports hors mariage — qu’elles soient prostituées, domestiques ou filles de bonne famille « dévoyées » — sont particulièrement visées.
Le texte insiste d’ailleurs sur un point essentiel : les nombreux enfants mort-nés ou décédés sans avoir été baptisés sont, aux yeux de l’Église et de l’État, condamnés à la damnation. Ne pas déclarer sa grossesse, c’est donc, littéralement, cacher une âme à sauver. D’où l’obligation faite aux curés et vicaires de lire régulièrement l’édit en chaire, comme le rappellera Henri III en 1586. L’édit devait en effet être lu tous les trois mois au prône des messes paroissiales, histoire que personne n’ait l’excuse de l’ignorance (même si, entre nous, beaucoup de curés oubliaient de le lire, comme le montre un florilège d’arrêts parlementaires agacés du XVIIIe siècle).
Les conséquences économiques d’une naissance hors-mariage pouvaient se révéler importantes, une bouche supplémentaire à nourrir et des difficultés à trouver un homme qui accepte de s’unir à une fille-mère et à prendre en charge l’enfant illégitime. Ce système vise à dissuader à la fois les avortements clandestins et les abandons d’enfants. Mais il repose sur une injustice fondamentale : seules les femmes sont concernées. Leur silence, leur isolement ou leur peur deviennent des preuves contre elles.
Toutes les femmes ne portaient pas plainte contre le père de l’enfant. Beaucoup se contentaient de déclarer leur état pour se conformer à la loi. Mais certaines, en particulier quand elles estimaient avoir été trompées ou violentées, engageaient une procédure judiciaire. C’est ce qu’on appelait alors une « plainte de grossesse ». Le but ? Faire reconnaître la paternité, exiger un mariage ou au minimum le paiement des frais de gésine (accouchement, couches, etc.). À Figeac, par exemple, ces plaintes représentaient environ 1,5 % des affaires familiales traitées par la justice seigneuriale à la fin du XVIIIe siècle.
Ces procédures soulignent combien la déclaration de grossesse était aussi un outil social : elle permettait d’assurer une forme minimale de reconnaissance pour l’enfant, et une assistance financière pour la mère.
Cela servait aussi pour obtenir justice en cas d’agression, comme en témoigne l’exemple d’une bergère du causse de Gramat en 1767. On peut y lire que Marie, bergère, habitante du village de Capmas, paroisse de Saint-Simon, âgée de 31 ans, déclare être enceinte de trois mois et demi en août 1767. Elle atteste de sa grossesse devant le juge, et accuse François, tailleur, habitant de la paroisse de Saint-Simon, alors homme marié. Sa plainte transcrit la violence des faits, imposés par l’homme. Il la soumet « charnelement de force pendant trois fois en trois différents jours ». Le mot « viol » n’est jamais employé, il s’agit d’un terme inusité à cette période, il est question de « séduction de force » contre laquelle la jeune Marie a tenté de se défendre « ce qu’elle ne voulait faire, ayant résisté longtemps ». La déclaration de grossesse est ici la preuve du crime et le point de départ d’une procédure portée devant la juridiction pour tenter d’obtenir justice contre son agresseur. Résultat ? Aucune poursuite n’a été retrouvée. Marie finira seule avec son enfant et une réputation flétrie.
Où avaient lieu ces fameuses déclarations ?
Les femmes devaient prêter serment devant un officier de justice ou un notaire. Pour éviter de décourager les jeunes filles à faire leur déclaration de grossesse, on leur laissait une certaine liberté quant à l’autorité à laquelle s’adresser. C’est cette souplesse qui justifie qu’un notaire, par exemple, puisse enregistrer une telle déclaration, même si cela relevait habituellement de la compétence d’un juge.
Selon les juridictions, la déclaration pouvait être reçue par un lieutenant de bailliage, un sénéchal, un procureur fiscal, un commissaire du Chatelet (à Paris), ou même un notaire. Certaines femmes déclaraient d’elles-mêmes, d’autres y étaient poussées par leur entourage (ou par la rumeur publique). Et parfois, c’est un tiers — médecin, sage-femme ou voisin — qui déposait en leur nom, comme pour Madame la marquise de Montbrun, en 1695, dans le minutier du notaire Jacques Saurazac à Cahors, 3 E 262 / 73. La grossesse de Magdaleine de Chapt de Rastiniac, marquise de Montbrun, veuve de Charles de Mouslac, seigneur marquis de Montbrun, est déclarée par sa sage-femme, Marguerite de Martin le 28 avril 1695 auprès du notaire. Madame ne se déplace pas personnellement à cet effet. L’état de la marquise avait été reconnu et confirmé par son médecin, également huissier, ainsi que son chirurgien, ayant le sentiment qu’elle est « ensainte ». La déclaration, succincte, ne fournit pas plus d’éléments.
De même, on ne les obligeait pas à s’adresser au juge de leur propre domicile, bien que celui-ci soit théoriquement le mieux placé pour les accompagner et les protéger. En pratique, les femmes ont largement profité de cette liberté : dans toutes les séries d’archives étudiées par M.C. Phan, il a été observé qu’un grand nombre des femmes concernées ont fait leur déclaration dans une autre localité que celle où elles résidaient habituellement.
Et que contiennent ces déclarations ?
L’acte mentionne leur identité, leur âge, leur domicile, le nom de leurs parents ou de leur défunt mari si elles sont veuves. On précise aussi, si la femme l’accepte, le nom du géniteur, souvent désigné par l’expression savoureuse de « séducteur ».
On ajoute parfois l’âge, la profession du père présumé, et le contexte de la grossesse. Parfois, la déclaration est laconique. D’autres fois, elle est accompagnée d’un récit détaillé, où la femme explique les circonstances de sa relation : promesse de mariage, séduction, viol, ou liaison discrète. J’ai lu l’histoire de Louise, 40 ans, veuve à Cahors, qui s’était amouraché d’un perruquier élégant. L’homme avait promis le mariage, la séduit, puis… épousa une autre. Dans sa déclaration, Louise raconte tout : leurs rendez-vous, ses espoirs, sa trahison. Elle supplia la justice de « faire enregistrer sa grossesse » pour éviter toute mauvaise interprétation en cas de malheur. Une scène digne des séries actuelles.
ll y a aussi l’histoire d’Anne en 1671, fille de bonne famille, mineure de 19 ans, enlevée par un ancien domestique de sa famille, devenu apothicaire. Ravissement ou fuite des amants ? Les deux jeunes gens sont finalement rattrapés suite à une plainte du père, et Anne est déclarée enceinte d’un enfant qui naîtra en juin et décédera en juillet. Le jeune homme, à qui on reproche d’avoir abusé de la confiance de la jeune fille en utilisant ses années de service dans la maison familiale, est poursuivi. Il ne reste pas beaucoup de traces du dossier mais le verdict reste clair : le fautif doit « être pendu et éstranglé ». Ce qui est fait en août… Anne se marie deux ans plus tard, avec le consentement de sa famille, à un maître apothicaire. Est-ce un hasard ?
À Carcassonne, sur plus de 300 déclarantes, seules deux refusent de nommer le père. À Trans-en-Provence, au contraire, le nom du géniteur est systématiquement tu.
Il faut dire que certaines femmes faisaient leur déclaration non pour protéger l’enfant, mais pour pouvoir un jour attaquer le père en justice pour pension alimentaire.
Et parfois, la déclaration entraînait… une arrestation immédiate du séducteur, grâce à une « plainte-déclaration ». Ambiance.
Ces documents sont d’autant plus précieux qu’ils laissent une place rare à la voix des femmes, dans un monde d’archives presque exclusivement masculin.
Quel succès pour cette loi ?
Il est pratiquement impossible de mesurer avec précision combien de jeunes filles ou de veuves ont effectivement déclaré leur grossesse. Ce que l’on peut en revanche tenter de comprendre, ce sont les raisons qui les poussaient à le faire — ou, au contraire, à s’en abstenir.
Certaines femmes agissaient de leur plein gré, par peur des sanctions prévues par la loi. D’autres n’avaient guère le choix : ce sont parfois des voisins, des logeurs ou des sages-femmes — soucieux de ne pas contrevenir eux-mêmes à la réglementation — qui signalaient la grossesse et forçaient ainsi la main à la future mère. Mais l’un des principaux motifs, presque universel, reste la volonté de se retourner contre le séducteur. Dans un très grand nombre de cas, c’est cette perspective — obtenir réparation, un mariage ou une pension — qui motive à elle seule la démarche. Les archives de Carcassonne montrent d’ailleurs que les femmes n’agissaient souvent qu’après un certain temps, bien après avoir eu connaissance de leur grossesse. Ce qui déclenche réellement la déclaration, c’est un événement marquant : le départ du séducteur, une rupture, des menaces, ou encore ses fiançailles avec une autre. Tant que la relation amoureuse tient, tant qu’il existe l’espoir d’un mariage ou d’un soutien matériel, la jeune femme reste dans l’attente. Mais dès que cet espoir s’effondre, elle se tourne vers la justice pour obtenir un dédommagement, faire pression sur un amant hésitant ou convaincre des parents récalcitrants.
À l’inverse, de nombreuses femmes choisissaient de garder leur grossesse secrète. Les raisons ne manquaient pas : méconnaissance de la loi, coût parfois prohibitif de l’enregistrement de la déclaration par les officiers de justice (jusqu’à 9 livres en 1779, c’est à dire plus de 100 euros pour nous en 2025 !), ou pratiques locales qui toléraient, voire protégeaient ce silence. Mais le facteur déterminant restait le désir de discrétion. Et la difficulté de s’adresser à des magistrats influencés par des normes morales rigides, et peu enclins à comprendre la complexité de leur situation.
Une géographie à géométrie variable
Les déclarations de grossesse s’inscrivent dans un temps long, allant de la seconde moitié du XVIIe siècle jusqu’au tout début du XXe siècle. On peut globalement distinguer trois grandes phases dans leur usage. La première, surtout dans les grandes et très grandes villes, commence dès le XVIIe siècle, connaît un véritable essor au XVIIIe, puis s’interrompt autour de la Révolution, vers 1789. Ensuite, une seconde vague apparaît à partir de 1791, mais elle reste de courte durée. Enfin, une troisième période s’étend sur tout le XIXe siècle, avec des formes très variables selon les régions, mais plutôt dans les petites communes et se prolonge dans quelques endroits jusqu’aux premières années du XXe siècle.
Les déclarations ne sont pas partout aussi fréquentes. Il a été recensé des centaines, voire des milliers de cas à Carcassonne, Grenoble, Nantes, Provins, Lyon, Meulan, Étampes, etc. Au vu de ce chiffres, on comprend que pour chaque juridiction, ça n’est pas énorme… Un peu plus de 300 déclarations à Carcassonne…
Où trouver ces documents (et ne pas les rater)
En ville comme à la campagne, chaque lieu pouvait avoir ses propres usages, ce qui rend la recherche à la fois complexe et passionnante. Les généalogistes aventureux pourront dénicher ces archives disparates et dispersées dans plusieurs types de fonds :
Archives départementales, Série B : juridictions civiles et criminelles d’Ancien Régime.
Série L ou U : Révolution et Empire.
Série 3E : notaires, notamment dans les grandes villes.
Fonds communaux (E dépôt) : parfois riches en petites juridictions locales.
Attention : beaucoup de ces actes étaient rédigés sur feuilles volantes, et mélangés à d’autres pièces. Ils peuvent être planqués dans une liasse intitulée « Divers » ou « Pièces de procédure ».
Et vous avez pu noter que les femmes enceintes non mariées pouvaient librement effectuer leur déclaration n’importe où … Celles qui avaient moyen de se déplacer ayant tout intérêt de la faire dans les lieux d’anonymat que sont les plus grandes villes. Bref, c’est un vrai jeu de piste.
Sans compter que votre ancêtre n’a peut-être jamais déclaré sa grossesse…
Une archive pas comme les autres
Entre le drame intime, la justice tatillonne, la religion omniprésente, les stratégies féminines et les rebondissements juridiques, la déclaration de grossesse est un objet unique. Elle fait le pont entre le droit, la morale, l’amour, la honte… et l’identité. Pour nous, généalogistes, c’est une clef. Une clef pour compléter aider à une branche, raconter une histoire, donner une voix à celles qui ont été réduites au silence.
Alors, à votre prochaine séance d’archives, au lieu de foncer tête baissée vers les registres paroissiaux, arrêtez-vous un instant. Et demandez donc à consulter les liasses B ou L. Avec un peu de chance, vous retrouverez des éléments intéressants…
N’hésitez pas à partager avec moi vos expériences personnelles avec ces déclarations de grossesse…
10 réponses
Bonjour
Merci pour ce “reportage” très intéressant!
Merci pour cette étude précise pour aider les amateur non averti comme moi
ma grand-mère ,a accouché de ma mère le 1/1/21 ! le nom du père est absent ..d’où la difficulté de trouver une généalogie fiable !
l’acte de naissance de ma mère porte le nom de sa mère rayé et remplacé par le nom de l’époux de sa mère en 1927 “légitimé par mariage “
Difficile d’établir un arbre à partir de femmes (je suis la 7° génération par les filles !
Bonjour, super intéressant , peut effectivement être utile pour des recherches un peu scabreuses . Merci pour cette publication. Cordialement
Félicitations pour ce travail très intéressant. !
Article toujours très intéressant, je ne savais pas comment retrouver ces déclarations. Dès que possible je vais aux AD39 pour mes recherchées.
Bonjour,
Bravo pour cette synthèse utile et complète
J’en ai trouvé chez le juge de Paix en Loire Atlantique pendant la Révolution
Merci
JPM
Ma grand-mère est tombée enceinte à 17 ans en 1920, et a accouché en 1921 à 18 ans, d’un homme dont ns ignorons l’identité. Etant jeune, je n’aurais jamais osé l’interroger sur sa vie privée de mère célibataire. Il est possible que ce soit un inceste car elle vivait ds une grotte, en milieu clos, avec des frères.
Ensuite, elle est tombée une 2nde fois enceinte fin 1930 en tant que mère célibataire, de ma mère, et a accouché en 1931. A l’époque, être mère célibataire en 1921 et 1931, était une véritable honte sociétale. Les mères célibataires se voyaient traitées de “traînée” en public, par les “honnêtes femmes mariées”.
En ce qui concerne mon gd-père biologique que je n’ai jamais connu, c’était un immigré italien qui avait fui le régime du roi Emmanuel III de Savoie, qui faisait la guerre contre l’Autriche Hongrie (le conflit entre les 2 pays régnait depuis 1815). Cet homme avait donc fait la guerre en Italie pdt 11 mois en 1818/19, il avait servi avec loyauté et sa conduite avait été exemplaire, mais il avait été réformé pour troubles dépressifs à l’hôpital de Reggio Emilia. Il avait reconnu ma mère à sa naissance, mais ma gd-mère n’avait pas voulu l’épouser, car non seulement il était dépressif (j’avais retrouvé sa fiche militaire en Italie), mais cette dernière disait qu’il ne voulait pas travailler, était coureur de jupons, et buvait. Il voulait vivre à ses crochets.
Est enfin arrivé le sauveur, un veuf avec 3 enfants, qui a racheté le déshonneur de mère célibataire de ma gd-mère, en l’épousant avec ses 2 enfants, comme on achète une vache. Elle allait élever ses 3 enfants. J’ai une photo de leur mariage en 1932 avec leur 5 enfants. Il lui en avait fait 4 autres. Bref, ce n’était pas l’époque Metoo ou le wokisme… Il maltraitait ma gd-mère qui trimait tte la journée aux travaux des champs, en élevant 9 enfants. Lui, il allait jouer au billard au bar du village, dépensait les quelques deniers destinés au foyer, en offrant à boire à ses potes, il avait même une maîtresse dans le village.
Ma gd-mère était une solide paysanne, dont le père et le grand-père étaient originaires de Lorraine. Ils avaient quitté la Lorraine en 1872, comme suite à la guerre de 1870 et au traité de Francfort du 10 mai 1871, prévoyant que les alsaciens-lorrains nés ds une commune annexée par le IIème Reich, devaient quitter le territoire et opté pour la France s’ils ne voulaient pas devenir allemands. Ils ont donc fui ds le délai-limite imparti, à savoir avant le 30 septembre 1872. Ils sont même arrivés en Août 1872 ds l’Aisne (la fiche militaire de l’arrière petit-fils de mon arrière arrière-grand-père maternel, atteste que son père avait opté à Metz pr la France, pr lui et son fils de 6 ans). Mon arrière arrière-grand-père, le seul à devoir opté, ne l’avait pas fait, car parlant un dialecte, le francique mosellan, il n’avait pas dû comprendre le terme francophone “opter”, annoncé par le tambour de ville, et était donc devenu, de fait, Allemand sans le savoir…
Bref, il étaient 6 à avoir quitté la Lorraine, sans doute en charrette, laissant tout derrière eux. En arrivant ds l’Aisne “nus et crus”, ils s’étaient installés ds une grotte. C’étaient de simples manouvriers agricoles déjà très pauvres en Lorraine, dont la paupérisation était devenue exponentielle après la migration. De plus, ils devaient essuyer le mépris de la population locale qui les prenaient pr des “traîtres”, alors que c’était tout le contraire…
Je connais le sujet. J’ai écrit un texte sur une jeune fille qui s’est nommée Marie Antoinette toute sa vie, elle n’a jamais eu de patronyme. Sa mère a déclaré sa grossesse sans nommer le père mais elle s’est occupée de sa fille. Les actes de baptême, mariage et décès ne reprennent que son prénom..
Procès criminels de l’Auvergne jugés en appel au Parlement de Paris.
(Jean-Pierre BARTHÉLEMY, publications du CGHAV).
Jeanne ANDRÉ habitante de St-Eble, près de Langeac, âgée de 24 ans, a celé sa grossesse et son enfantement lors duquel elle n’a pas pris témoignage de la vie ou la mort de l’enfant dont elle s’est accouchée le 4 juin 1733 ; elle est ainsi réputée l’avoir homicidé. Elle a avoué avoir été enceinte de son beau-frère, Antoine PIGEON, laboureur, époux de Marie ANDRÉ qui sont aussi poursuivis.
La Cour du Parlement de Paris casse un premier jugement à Langeac et la renvoie devant le Lieutenant Criminel de Riom. Condamnation à la pendaison et injonction aux juges de faire publier par les curés de 3 mois en 3 mois aux prônes des messes paroissiales la déclaration d’Henri II.
La condamnation est confirmée par le Parlement de Paris et le 30 août 1735 Jeanne ANDRÉ est pendue sur la place publique de St-Eble.